Abstention

Pas besoin d'être un grand devin pour savoir que l'abstention sera la grande gagnante des élections départementales et régionales de ce week-end. Les experts, politologues, politiciens vont se succéder sur les plateaux télé et aux micros des radios pour analyser cette abstention, en expliquer les raisons, imaginer ce qu'il faudra faire pour remobiliser les électeurs... Pour les perdants, l'abstention sera l'explication de leur mauvais score, les gagnants oublieront volontiers que le nombre de suffrages recueillis est en fait bien peu de choses par rapport au nombre d'électeurs inscrits, voire au nombre d'habitants de leur département ou région. Refrains déjà mille fois entendus... Qu'importe, le taux d'abstention sera élevé. Au moment de décider d'aller ou non voter, il serait bon d'avoir une pensée émue pour les Hongkongais qui ont plié sous les coups de joug chinois, pour les Birmans qui meurent d'avoir réclamé pacifiquement une véritable démocratie, pour les Syriens qui viennent de vivre dix ans d'une atroce guerre pour avoir eux aussi manifesté en paix, pour les Égyptiens qui se sont fait voler leur révolution par un général en mal de pouvoir, pour... Pour tant d'autres qui à travers le monde, à travers le temps sont morts au nom de la liberté et pour une idée en laquelle ils croyaient : la démocratie. Voter ou ne pas voter, nous avons le choix. Voter pour tel ou tel, nous avons le choix. On peut penser ce qu'on veut des candidats, ils nous représentent, ils nous ressemblent et, surtout, ils représentent tout l'éventail politique que peut offrir une démocratie. Et ça, ça n'a pas de prix. En France, comme dans d'autres pays où cette liberté de vote et d'expression politique existe, nous vivons dans un confort démocratique qui nous fait oublier à quel point cette idée a un prix élevé. En vies humaines.